Rencontre bilatérale entre le PCRF et le Parti Communiste du Vénézuéla
En septembre 2024, le PCRF a rencontré, en bilatérale, avec le Secrétaire général de notre parti, Pierre Komorov, accompagné d’un membre de la Commission internationale du PCRF, Hector Alejo Rodriguez, Secrétaire à l’International du Comité central du PCV.
Hector Alejo Rodriguez vit aujourd’hui exilé en Espagne, suite à la répression inouïe du gouvernement Maduro, exprimant la crise de la bourgeoisie nationale vénézuélienne, répression que les communistes subissent de plein fouet. Cette rencontre s’est concentrée sur une analyse léniniste de la situation politique au Venezuela, analyse établie par le PCV, ainsi que sur des questions tactiques en découlant dans une lutte de classes exacerbée.
En effet, l’autoritarisme du gouvernement Maduro ne tombe pas du ciel, mais exprime bien la volonté de fractions bourgeoises et de leur État, qui, sous l’impérialisme mondial, dépendent d’autres monopoles et cherchent à renforcer l’exploitation de classe afin de maintenir leur place dans ces jeux d’alliances. À l’heure où le Nouveau Front Populaire nourrit déjà des illusions en France, et où même dans le mouvement communiste, des tendances opportunistes entretiennent de fausses conceptions de l’impérialisme, pour mieux soutenir certaines bourgeoisies nationales face à d’autres, dans des contradictions grandissantes, les luttes du PCV nous rappellent que si la forme de la social-démocratie change, le contenu reste le même aujourd’hui. Des alliances électorales fortuites à la défense du « Socialisme du 21ème siècle », c’est l’une des ailes du capital qu’incarne toujours la social-démocratie, venant canaliser la lutte de classes ou la menant frontalement contre les travailleurs quand il le faut.
Le secrétaire général du PCRF, Pierre Komorov, a pu souligner en ce sens l’apport universel et international du PCV dans son expérience et son travail d’analyse concernant la révolution nationale démocratique. À l’heure d’un impérialisme mondial aux forces décuplées depuis la contre-révolution généralisée, la révolution nationale démocratique tombe dans l’impasse si elle n’est pas concrètement, dès le début, liée au socialisme, comme le démontre la déliquescence du Bolivarisme. Alors que dans tous les pays, les forces productives et la classe ouvrière se sont développées, la nécessité de l’autonomie prolétarienne avec son parti communiste est une condition renforcée et obligatoire des luttes politiques aiguës, dont sont parties prenantes les communistes ; c’est ce que le PCV a démontré en actes en construisant cette autonomie et en la défendant sans la compromettre au fil de la révolution bolivarienne jusqu’à aujourd’hui, dans sa période de déliquescence totale.
La situation politique est donc celle d’une crise de légitimité politique du gouvernement vénézuélien, tandis que tout indique que celui-ci a de fait perdu les élections et les a truquées.
Le gouvernement n’a pas donné de preuves concrètes de sa prétendue victoire, une fraude manifeste ayant déchaîné les luttes de classes présentes. Pourquoi y aurait-il fraude ? Le camarade Rodriguez a pu rappeler qu’au Venezuela, les élections sont digitales, elles se font dans un centre de vote et de manière complètement électronique. À la fin des votes, chaque machine transmet et imprime les résultats nationalement. L’acte imprimé doit être doublement vérifié selon la Constitution, et chaque témoin a droit à une copie de l’acte.
Selon les fameux actes imprimés, le PSUV aurait perdu à 30 contre 70, mais le gouvernement a lancé dès le départ une campagne soutenant qu’il s’agissait de faux. Toutes ces actions ayant soulevé des doutes, il y a eu des manifestations spontanées et une répression très forte : 1000 détenus, 25 morts, toute voix critique continuant aujourd’hui d’être réprimée.
Pourquoi cette situation ? Comment cette fraude a-telle pu être le catalyseur d’un tel mécontentement populaire ? Deux éléments sont centraux pour le PCV.
Tout d’abord, le PSUV a eu un tournant droitier, exprimant par là la voix des monopoles nationaux et de leurs alliances étrangères inter-impérialistes à travers des négoces illégaux sur l’industrie pétrolière. Le Venezuela est l’objet de toutes les convoitises bourgeoises, dues à sa situation économique, sa bourgeoisie nationale vivant en grande partie d’une rente pétrolière dont tout l’enjeu concerne l’investissement international. Les entreprises et le gouvernement veulent donc préserver à tout prix une place gagnée depuis Chavez, en tant que rentiers premiers du pétrole, mais aussi comme garants des jeux d’alliances et d’investissements sur le sujet. On notera également que le gouvernement compte beaucoup de hauts gradés militaires : c’est un régime militaire sous-jacent, visant à défendre coûte que coûte la bourgeoisie nationale exprimée ici par Maduro.
Deuxièmement, la violence des sanctions étrangères est à prendre en compte dans cette explosion des luttes. En fragilisant une situation de classes instable par une fraude manifeste, ce sont les bourgeoisies étrangères (américaine en premier lieu), qui lorgnent donc sur une bourgeoisie affaiblie et sur la possibilité d’interventions militaires, afin de rafler la rente pétrolière. D’un côté, la bourgeoisie et Maduro doivent donc réprimer le plus vite possible les manifestants afin de ne pas faiblir face aux bourgeoisies concurrentes ; de l’autre la population défend ces droits démocratiques dans une situation d’instabilité que le PSUV a lui-même créée.
Le grand perdant de ces élections est donc la classe ouvrière vénézuélienne : l’isolement international provoqué par Maduro aggrave les conditions de vie des travailleurs, et permet de les mater en raison de l’argument fallacieux d’être des « terroristes », de marcher pour « l’impérialisme ». On notera l’interdiction des grèves, les attaques contre le Code du travail, ou encore la répression syndicale n’ayant cessé de s’intensifier depuis quelques années, tout comme la répression contre le PCV lui-même, en tant que parti de la classe ouvrière : invention de chefs d’accusations, formation fantoche d’un faux PCV, afin d’empêcher toute participation électorale des communistes, ou encore tentative d’infiltration du Parti, sont devenues des formes de luttes quotidiennes de la bourgeoisie vénézuélienne afin de faire taire les communistes.
Les grands vainqueurs sont donc les entreprises : le renforcement de la répression permet en effet l’exploitation toujours aggravée de la classe ouvrière. Les entreprises préfèrent d’ailleurs Maduro, afin de maintenir la stabilité financière : Total pour la France, ou Chevron concernant les U.S.A, sont bien moins des opposants que des alliés économiques des entreprises vénézuéliennes aujourd’hui parfaitement alignées. Aujourd’hui, le PCV a créé un « Front démocratique populaire », un front à vocation tactique dans une situation de lutte inédite. Le but est de créer un pôle indépendant des deux autres fractions bourgeoises en lice et de leurs jeux d’alliances, et donc de ne pas lier ce pôle à l’opposition de fraction bourgeoise de droite appelant depuis le début de la crise à une intervention militaire extérieure. Par ce front, il s’agit de condamner la répression et la fraude électorale. Aujourd’hui, la situation est telle qu’une intervention militaire étrangère pourrait même être soutenue par une partie de la population, l’aile la plus réactionnaire soutenant cette possibilité. La position immédiate du PCV est la demande de libération des prisonniers, la transparence électorale, et la condamnation de toutes interventions étrangères : le front vise à renverser la balance par ces mots d’ordre et à gagner à nouveau une autonomie de classe, afin que les travailleurs ne se rangent pas derrière l’une ou l’autre des bannières bourgeoises.
Le camarade du PCV a d’ailleurs signalé les luttes existantes autour de l’héritage de Chavez. Une des tâches du PCV est de démontrer que Maduro n’est pas seulement une « dérive » ou une « déviation » de la révolution bolivarienne, mais la conséquence historique d’un mouvement fonctionnant sur des bases bourgeoises et petites-bourgeoises, ne pouvant que péricliter et entrer en confrontation directe avec les travailleurs à terme. Seuls nos Partis communistes sont en capacité de répondre aux nouvelles attaques du capital, aux nouvelles crises de l’impérialisme mondial, renforçons nos Partis, faisons vivre l’internationalisme !
Vous pouvez également retrouver la traduction en français du communiqué du secrétaire aux relations internationales du Comité Central du PCV et la vidéo de soutien du PCRF au Parti Communiste du Venezuela (PCV) sur notre chaîne TV Rouge IC respectivement ici et ici.